Vie et OEuvre d’Elisa Lemonnier (1805-1865)
Exposition Élisa Lemonnier

Il y a cent cinquante ans disparaissait Elisa Lemonnier, fondatrice des premières écoles professionnelles ouvertes aux femmes.

Issue de milieux progressistes, influencée par des figures notables de la réflexion féministe, Elisa Lemonnier se révéla visionnaire en proposant un enseignement professionnel destiné spécifiquement aux femmes. Elle consacra à ce projet les dernières années de son existence, laissant le souvenir d’une personne industrieuse, charismatique, et animée d’un grand désir d’être utile aux autres.

Afin de commémorer sa disparition et de perpétuer sa mémoire, cette exposition interactive fait le récit de sa vie et des étapes qui l’amenèrent à imaginer, puis à mettre en œuvre son grand projet pédagogique.

Jeunesse

C’est à Sorèze, dans le Tarn, que naquit, le 24 mars 1805, Marie-Juliette Elisa Grimailh, dans une famille de cinq enfants. Ayant perdu tôt son père, elle fut mise en pension chez une cousine à la campagne, qui lui inculqua un fonds de connaissances et de bonnes manières, puis revint s’établir d’abord à Sorèze.

La ville abritait, depuis le XVIIe siècle, un Collège renommé, que fréquentaient les frères d’Elisa. C’est là qu’elle rencontra Charles Lemonnier, un jeune professeur de philosophie, qu’elle épousa en 1831.

Influences

Cette seconde salle - encore à l’état d’esquisse - évoque des personnes qu’Elisa Lemonnier a rencontrées et qui ont eu une influence sur le développement de sa pensée sociale.

Le projet est de présenter ces contemporains et contemporaines d’Elisa sous la forme d’une galerie de portraits. Il reste de nombreux portraits à trouver !

Mutations

Cette section est encore vide et fera l’objet d’un traitement particulier.

Fondation

Cette salle (toujours en cours de constitution) évoque le grand œuvre d’Elisa Lemonnier, la fondation, par elle-même et un collectif de « dix-huit dames », de la Société pour l’Enseignement professionnel des Femmes, et surtout l’ouverture, dans Paris, de plusieurs établissements de formation : rue de la Perle et rue de Rochechouart du vivant de la fondatrice, et sur plus de quinze autres sites par la suite.

Postérité

Cette salle évoque la façon dont s’est forgée, à la fin du XIXe siècle et tout au long du XXe, la mémoire d’Elisa Lemonnier et de son œuvre.

Ses premiers biographes furent ses proches, à commencer par son époux Charles, auteur d’un texte émouvant plusieurs fois republié, et sa proche collaboratrice Julie Toussaint, qui prit à sa suite la direction des Écoles Élisa Lemonnier – et rendit à leur fondatrice de multiples hommages.

Salle de lecture

Salle de lecture

Saint-simonisme

Ecoles Elisa Lemonnier

Après 1860

Seulement deux écoles furent, à la fin de sa vie, fondées par Elisa Lemonnier elle-même.

La première, qui fut d’abord installée en 1862, dans un local loué au n°9 de la rue de la Perle, déménagea l’année suivante vers un emplacement proche, au 23, rue du Val-Sainte-Catherine (aujourd’hui rue de Sévigné).

La seconde école ouvrit en 1864 au 72, rue de Rochechouart (l’emplacement est aujourd’hui occupé par une école maternelle de la ville construite en 2006, au n°68).

Après 1865

Dans les années qui suivent la disparition d’Elisa Lemonnier, ses ami·e·s s’organisent pour perpétuer son œuvre.

Julie Toussaint, qui prend la direction de la Société, doit parer au plus pressé : les élèves, désormais nombreuses, se trouvent à l’étroit dans les deux locaux loués. L’école de la rue de la Perle est ainsi transférée 11, rue des Francs-Bourgeois, et celle de la rue de Rochechouart au 37, rue de Laval.

Après 1870

Conseillée par Charles Lemonnier, Julie Toussaint rassemble de nouveaux appuis financiers, grâce auxquels trois nouvelles écoles seront ouvertes :
- 70, rue d’Assas,
- 25, rue de Reuilly,
- 290, rue Saint-Honoré.

En octobre 1874, 600 élèves fréquentent les cinq établissements.

Après 1880

Suite à la victoire républicaine à la Chambre des députés, puis au Sénat, et à l’accession de Jules Grévy à la présidence de la République le 30 janvier 1879, les amis de Lemonnier sont au pouvoir, et favorisent la création de nouvelles écoles.

Paris en voit s’ouvrir six :
- 1881 : rue Fondary,
- 1882 : rue du Poitou (municipalisation de l’école
           de la rue des Francs-Bourgeois),
- 1882 : rue Bouret (école Jacquart),
- 1884 : rue d’Abbeville,
- 1884 : rue Ganneron,
- 1890 : rue de la Tombe-Issoire.

Après 1890

Tandis que l’on municipalise les écoles, la Société décide de ne conserver que deux établissements, dont l’organisation est modifiée de façon à les présenter comme des écoles modèles. Sont construits, sur des plans longuement étudiés, deux établissements offrant les aménagements nécessaires.

Le premier est édifié au 24, rue Duperré et accueille 220 élèves venant de l’école anciennement sise rue de Rochechouart.

Le second immeuble est construit au 41, rue des Boulets (où l’on peut toujours le voir).

Après 1970

En 1971, l’école de la rue Duperré est transférée rue Dupetit-Thouars, et s’appelle désormais le Lycée technique municipal. École Supérieur des Arts appliqués Duperré.

L’école de la rue des Boulets quant à elle fonctionne depuis janvier 1972 dans un lycée neuf situé 20, rue Armand Rousseau, dans le douzième arrondissement de Paris, le Lycée technique Elisa Lemonnier.

Ces deux établissement sont désormais mixtes.

Pierre-Michel Adam d’après Christian Rauch
Sorèze
Gravure extraite du Guide pittoresque du voyageur en France de Girault de Saint-Fargeau, 1838 (tome 4, Département du Tarn, p.12)

A. Ferrassini
Flora Tristan
Gravure de Baron, tirée de l’album L’Artiste, ca 1844.

Philipoteau del., Frilley sculp.
Le Père Enfantin
Gravure exécutée en 1860
Dimensions 29x22 cm.

Séraphin Denécheau
Elisa Lemonnier
Buste en plâtre.

Etienne Charavay
Notice au dos d’un
cahier de devoirs

non attribué
Charles Lemonnier
Buste en plâtre.

Heliogravure de Dujardin
Élisa Lemonnier
Photographie reproduite par héliogravure dans : Charles Lemonnier,
Élisa Lemonnier, Fondatrice de la Société pour l’Enseignement professionnel des Femmes. Troisième Édition. Paris : Imprimerie générale Lahure, 1893.

Thomas Casimir Regnault
Marie Juliette Elisa Lemonnier

non attribué
Madame Élisa Lemonnier

Charles Lemonnier
Biographie d’Élisa Lemonnier
Fondatrice de la Société pour l’Enseignement professionnel des Femmes. Troisième Édition. Paris : Imprimerie générale Lahure, 1893.

Dèzes de Grèzes
Plan topographique du Collège et de la Ville de Sorèze
Par Mr Dèzes de Grèzes, Ingénieur Géomètre de 1ère Classe, dédié à M. de Bernard Anselme, ..., Directeur de l’Ecole
Lithographie de Bonal Frères et Escudier (Toulouse)
1831.

Gallica
Biographie d’Élisa Lemonnier par Charles Lemonnier,
première édition (1866)

... fondatrice de la Société pour l’enseignement professionnel des femmes. Saint-Germain :L. Toinon, 1866.

Hachette, 1870
Nouveau Plan de Paris Divise en Vingt Arrondissements
A spectacular large format linen backed folding map of Paris, France. Published by the Hachette firm in 1870. Depicts the city in extraordinary hand colored detail with all train lines, streets and major buildings depicted. Comes with booklet containing a useful street index. Published from Hachette & Company’s 79 Boulevard Saint Germain office in Paris, France.


Tableaux des élèves de l’Abbaye-École par promotion


Maison natale d’Élisa Grimailh à Sorèze


Vue sur la campagne sorézienne depuis La Sabartarié

Auguste Terson de Paleville
Portrait de Raymond-Dominique Ferlus
Huile sur toile.


Caricature d’un professeur

Gallica
Suzanne Voilquin, Souvenirs d’une fille du peuple, ou
La Saint-Simonienne
en Égypte (1866)

Google Books
(texte partiel)
Flora Tristan,
Life stories,
par Susan Grogan (1998)

Le Maitron en ligne
(accès abonnés)
Notice biographique sur

Le Maitron en ligne
(accès abonnés)
Notice biographique sur Charles Lemonnier

Google Books
(texte partiel)
Sisters of the Brush: Women’s Artistic Culture in Late 19th-century Paris


Les lieux nommés d’après
Elisa Lemonnier
en France


PARIS - Rue Tronchet
Carte postale, E. Le Deley éditeur.
ca 1906.

Cartes postales anciennes
La vie dans les écoles Elisa Lemonnier

Brochure promotionnelle
Ecole professionnelle rue Bouret


Ancienne maison de maître à La Sabartarié
Photographie reproduite dans l’ouvrage de René et Pierre Ramond, En cèrca d’Elisà.

non attribué
Portrait de François Ferlus
Dessin reproduit dans l’ouvrage de René et Pierre Ramond, En cèrca d’Elisà (2001).

Portrait présumé de
Suzanne Voilquin

non attribué
Portrait de Caroline Coulomb du Barrau de Muratel
Photographie extraite du Petit almanach féministe illustré pour 1908

On recherche un
Portrait de Cécile Fournel

Edward Ancourt
Portrait de Pauline Roland
en 1830 à Falaise, gravé par A. Leray

On recherche un
Portrait d’Angélique Arnaud

non attribué
Portrait de Charles Lemonnier
Photographie positive sur papier albuminé, format carte de visite, extraite du recueil de portraits d’écrivains et hommes de lettres de la seconde moitié du XIXe siècle ayant appartenu au collectionneur Georges Sirot.

On recherche un
Portrait de Jacques Rességuier

Charles Fuhr
Portrait de Hippolyte Carnot
Photogravure de Pierre Petit, d’après une gravure de Charles Fuhr extraite du « Panthéon des Illustrations françaises », publiée par Lemercier & Cie vers 1850.

non attribué
Portrait de François Barthélemy Arlès-Dufour

Nadar
Portrait d’Alexandre Dumas père
Tirage au papier salé, 1855.

d’après Émile Bayard
Mademoiselle Rosa Bonheur, peintre récemment décorée...
... par Sa Majesté l’Impératrice.
Dessin d’Émile Bayard.

Nadar
Portraits des frères Émile et Isaac Pereire
Négatifs monochromes sur support verre.

On recherche un
Portrait de Julie Toussaint

non attribué
Portrait de Camille Sée


Bulletin de Paris
1884-1889
   &
Revue municipale
1918


Guides pédagogiques
1884-1900

Disderi & Cie Phot.
Jules Barthélémy Saint-Hilaire
Photographie au format carte de visite. Tirage albuminé. Ca 1860.

Joseph Machereau
Enfantin,
Michel Chevalier,
Barrault
Ménilmontant, Juillet 1832 / Croquis d’après nature par Machereau / reproduit d’après une estampe de la Bibliothèque nationale dans Histoire socialiste (1789-1900) sous la direction de Jean Jaurès, 1908, Tome 8 : Le règne de Louis-Philippe, par Eugène Fournière, p. 197.

Photo EMONTS
Maison habitée par
les saint-simoniens, rue de Ménilmontant n°145
Impression photomécanique.


La femme libre
Aquarelle tirée de Un siècle d’histoire de France par l’estampe, 1770-1870. Vol. 96 (pièces 12211-12336), Monarchie de Juillet.

Charles et Elisa Lemonnier
Avenir de la femme
Religion saint-simonienne, Église de Toulouse. Enseignement de l’Athénée.
Auteur : Lemonnier, Charles (1806-1891)
Éditeur : impr. de A. Hénault (Toulouse)
Date d’édition : 1831
Identifiant : ark:/12148/bpt6k85565s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 6943
Relation : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32371591c
Provenance : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007


Faire-part de décès d’Élisa Lemonnier


Les Merveilles de l’exposition de 1878


J’ai vu
N°214 - 1er août 1919

non attribué
Portrait de Léodile Béra, dite André Léo
Photographie non datée et non signée.


En 1838, le Guide pittoresque du voyageur en France décrit Sorèze comme une « petite ville située dans une plaine, sur le ruisseau de Sor, à 7 l[ieux] de Castres. Population 3,142 hab. » La notice développée qu’accompagne cette vignette rappelle le riche passé de la ville, autrefois organisée autour d’une abbaye de bénédictins, ruinée au XVIe siècle, et depuis 1750 autour d’un pensionnat bientôt réputé et finalement constitué en collège de « renommée européenne ». Après s’être étendu sur des particularités géologiques des environs, l’auteur précise que Sorèze a des fabriques de bonneterie en laine et en coton, plusieurs tanneries et des filatures de coton.

Source de la gravure : collection particulière.


Portrait de Marie Juliette Lemonnier de 3/4 droit dans un ovale posé sur un socle. Elle est assise, les mains sur les genoux, vêtue d’un bonnet à noeud nouée sous le menton. En arrière-plan, intérieur bourgeois, table et cheminée.

Sur la table est posée une feuille à côté d’une plume d’oie où l’on déchiffre : « Le 9 mai 1862, 2 rue Tronchet à Paris. dans les salons de Mme Lemonnier se sont réunies les personnes dnt les... ».

Sur le socle il est inscrit : « Fondatrice de la société / pour l’enseignement professionnel / Des femmes ».


Étienne Charavay, né le 17 août 1848 à Paris et mort le 3 octobre 1899 à Brolles, est un historien, éditeur et libraire français.

Il signe ici une biographie synthétique et flatteuse de celle qui créa les écoles professionnelles de jeunes filles, rappelant les prémisses en 1856 et 1862 de la Société pour l’enseignement professionnel des femmes et relatant l’ouverture des premières écoles.

La notice fait mention de Julie Toussaint, fille et nièce des pharmaciens saint-simoniens de Castelnaudary (où elle était née en 1839), qui succéda effectivement à Elisa Lemonnier à la tête des écoles professionnelles, et qui en récompense de cela reçut la Légion d’Honneur.

L’image en première de couverture de ce cahier de devoirs montre une vision idéalisée des premiers ateliers.

Source : collection particulière.


Le sculpteur français Séraphin Denécheau (1831-1912) présenta ce buste d’Elisa Lemonnier, semble-t-il, pour la première fois au Salon de 1886.

Quelques années plus tard, la Ville de Paris lui en commanda une copie pour la somme de 2.400 francs.


On manque de précisions sur ce buste en plâtre de Charles Lemonnier, semble-t-il conservé à l’ONU à Genève. Il est reproduite dans Le mouvement saint-simonien de Sorèze à l’Égypte, dir. Rémy Cazals, Portet-sur-Garonne, Éditions midi-pyrénéennes, 2012.

Peut-être fut-il sculpté peu après la mort de Lemonnier, comme cela avait été le cas pour son épouse qu’il rejoignait ainsi dans l’immortalité.

C’est en tous cas en 1892, peu après la disparition de ce « publiciste français » que paraît dans la Revue encyclopédique Larousse une notice élogieuse le concernant. On y rappelle son parcours intellectuel singulier, du saint-simonisme à la défense en Europe « des idées de paix et de liberté », en particulier en faveur d’une forme de confédéralisme européen.


L’immeuble à droite est le n°2, où vivait le couple Lemonnier à Paris
(la photo est prise de l’arrière de l’église de la Madeleine).

Source : www.cparama.com.


Cette troisième édition de la biographie d’Élisa par Charles Lemonnier comporte en quatrième page la reproduction d’une photographie d’elle, prise bien sûr à la fin de sa vie (voir notice précédente).

Rédigé peu après la disparition d’Élisa, le texte très exhaustif et empreint d’une exceptionnelle sincérité témoigne aussi de toute l’admiration et la tendresse de Charles Lemonnier envers son épouse.

Source : collection particulière.
Voir la première édition dans la section Bibliographie (ouvrages en ligne).


Cliquez sur la couverture pour feuilleter l’ouvrage.


Voici une émouvante photographie d’Élisa Lemonnier, prise à la fin de sa vie ; sa tenue trahit l’époque à laquelle fut pris ce cliché, qui date du Second Empire. Bien que les années se lisent sur son visage, marqué par une vie d’efforts et plusieurs maladies, elle nous sourit.

Source : collection particulière.


Typique des maisons à encorbellement de la ville est la maison de la rue de Revel à Sorèze où naquit, le 24 mars 1805, Marie-Juliette Elisa Grimailh.

Elle était la première d’une famille de cinq enfants, trois garçons et deux filles. Toute la famille habitait chez le grand-père d’Elisa, Jean-Antoine Grimailh.

En 1817, le père d’Elisa, Jean Grimailh, décède, ce qui amène Madame Aldebert, grand-mère maternelle d’Elisa, à venir s’installer avec sa fille et ses petits enfants ; cependant peu après Elisa quittera cette maison pour être confiée à une cousine de sa mère, Marie de Nairac.

Photographie : webmestre.

A la mort de son père, Elisa fut d’abord placée, ainsi que ses frères, dans une pension mixte de Sorèze, mais une cousine, Marie de Nairac (épouse d’un certain Cyr du Barrau de Muratel, d’où lui vient son surnom de Madame “Saint-Cyr” du Barrau), touchée par son intelligence, demanda à sa mère de la lui confier le temps de compléter son éducation et de parfaire ses manières.

Cette cousine vivait à La Sabartarié, hameau distant de quelques dizaines de kilomètres de Sorèze, sur une colline près de Saint-Affrique, et c’est là que la jeune Elisa passa trois ans.

Cette photographie montre la maison de maître où résidait alors la famille ; trop vétuste, la bâtisse fut détruite à la fin du vingtième siècle.

Source : Renat et Pèire Ramond, En cèrca d’Elisà (A la recherche d’Elisa), Sorèze et les Saint-Simoniens, Edition bilingue occitan/français, Lo Banquet n°11, Castres : Institut d’Estudis Occitans de Tarn, 2001, p. 49.

Lorsque la révolution française eut supprimé les corps religieux, le prieur Dom Despaulx, jusque là en charge du collège, quitta Sorèze. Sa succession fut prise par Dom (François) Ferlus (1748-1812), lui-même professeur de rhétorique et d’histoire naturelle, qui, devenu directeur en chef de l’école, réussit à y maintenir, par recrutements de nouveaux professeurs, un enseignement de qualité.

L’école pouvait alors accueillir jusqu’à 430 pensionnaires, et l’on y trouvait un observatoire, un cabinet d’histoire naturelle, un jardin botanique, un bassin de natation, un manège équestre, un arsenal d’exercices militaires, un laboratoire de chimie et un théâtre !

Dom Ferlus mourut en 1811, laissant la direction de l’école à son frère Raymond-Dominique.

Voir les œuvres de François Ferlus sur le site de la Bibliothèque nationale de France.

Source du portrait : Renat et Pèire Ramond, En cèrca d’Elisà (A la recherche d’Elisa), Sorèze et les Saint-Simoniens, Edition bilingue occitan/français, Lo Banquet n°11, Castres : Institut d’Estudis Occitans de Tarn, 2001, p. 44.


Ce plan de Sorèze nous montre l’importance du Collège, dont l’emprise, si l’on compte les jardins, représente les deux tiers de celle de la ville.

L’histoire de Sorèze est très ancienne. Au huitième siècle, Pépin le Bref fonde une première abbaye bénédictine, détruite un siècle plus tard par les Normands. En 903, l’abbé Walafride relève les murs de l’abbaye ; mais Sorèze est victime de plusieurs attaques, jusqu’en 1571 où les Huguenots brûle l’église et pillent l’abbaye.

Dès 1638, plusieurs pères bénédictins se consacrent à reconstruire une église, et un séminaire est ouvert en 1682. C’est Dom Victor de Fougeras qui met en œuvre, en 1759, un plan d’étude novateur qui fera la renommée du Collège de Sorèze.

En 1776, Louis XVI qui délocalise l’école militaire de Paris fait de Sorèze l’un des douze collèges militaires du royaume.

Source du plan : collection particulière.


« Ce séjour, à la fois élégant et rustique, fit sur Elisa une impression profonde. Elle y prit (...) cette passion de la terre natale qui, au dernier jour de sa vie, lui a fait désirer si vivement que son corps reposât dans un coin de cette belle plaine sur laquelle, jeune fille, elle avait tant de fois, du haut de la Sabartarié, promené les rêveries de sa pensée. », écrit Charles Lemonnier dans la biographie qu’il consacre à son épouse Elisa.

Outre le charme du lieu, Elisa put bénéficier, lors de son séjour auprès des Barrau de Muratel, d’une excellente éducation, soutenue par des lectures choisies et une pratique du monde acquise dans un milieu cultivée. C’est ainsi une jeune fille accomplie, élégante et bien élevée qui s’en revint à Sorèze au début des années 1820.

Photographie : webmestre.

Dans le hall d’entrée de l’Abbaye-École, ces grands tableaux portent encore les noms, promotion après promotion, des élèves, et l’on y retrouve ceux de plusieurs parents d’Elisa Grimailh :
- son grand-père Jean-Antoine et son grand-oncle Pierre pour la promotion 1788-1789,
- son oncle Adolphe en 1808-1809,
- et enfin, en 1818-1819, l’un de ses frères, Paul, qui y resta neuf ans et y fit toutes ses études.
Le frère aîné d’Elisa, Joseph, fréquenta également le Collège mais n’y resta que deux ans.

Photographie : webmestre.


Raymond-Dominique Ferlus (1756-1840) reprend à la mort de son frère, en juin 1811, la direction de l’école.

Mais en 1822, en pleine restauration, Louis XVIII nomme l’évêque conservateur Denis Frayssinous grand maître de l’Université ; s’ensuit une réforme de l’enseignement qui redevient une prérogative de l’église catholique, et Raymond-Dominique Ferlus est forcé de démissionner en 1824. Il retrouvera la direction de l’école en 1830, qu’il ne quittera plus jusqu’à sa disparition en 1840.

Ferlus avait une fille, Fanny, qui fut une amie proche d’Elisa Grimailh ; pour cette raison, et aussi parce que deux de ses frères y étaient élèves, Elisa fréquentait les salons, ouverts à la « bonne société » locale, de l’école, et c’est là qu’elle rencontra, en 1828, celui qui allait devenir son époux et son appui le plus fidèle, Charles Lemonnier.

Connu pour son activité littéraire, Raymond-Dominique Ferlus est l’auteur de plusieurs Discours, Odes et Elegies et traductions d’auteurs latins.

Ce portrait est dû à Auguste Terson de Paleville, peintre, dessinateur et photographe albigeois, né en 1814, qui fut lui aussi élève de l’École de Sorèze ; on lui doit un bel album de souvenirs consacré à cette école, et de nombreux portraits de ses contemporains soréziens.

Source du portrait : Musée de
l’Abbaye-École de Sorèze.
Photographie : webmestre.

On ne connaît pas de portrait du jeune Charles Lemonnier, qui rejoignit à la fin des années 1820 l’équipe pédagogique de l’école de Sorèze pour enseigner la philosophie et le latin. Est-ce lui, ainsi caricaturé par un élève dans un coin d’une version latine ?

Les débuts de Charles Lemonnier comme professeur à Sorèze ne furent pas simples : recruté en 1828, il dut rapidement démissionner, ayant refusé d’abjurer sa foi protestante, et quitta même la ville. Il fut réintégré en 1830 lorsque Raymond-Dominique Ferlus retrouva la direction de l’école.

De retour à Sorèze, Charles retrouva Elisa qu’il avait rencontrée trois ans plus tôt, dans les salons de l’école ; il se marièrent le 22 août 1831.

Source de l’image : Musée de
l’Abbaye-École de Sorèze.
Photographie : webmestre.


Cette gravure parue le 2 juillet 1865 en première page du Journal illustré est attribuée à L. David et J. Coomans, d’après un dessin d’Émile Bayard présenté au Salon de peinture de la même année.

Elle représente une vue imaginaire de l’artiste peintre Rosa Bonheur, portant la croix de la Légion d’honneur, que l’Impératrice Eugénie vient de lui remettre, et devant un paysage reprenant les thèmes chers à sa peintures : une paire de bœufs, qu’elle est en train de dessiner, devant un paysage bucolique. Le Journal fait en page 211 le récit de l’événement, et précise qu’elle est « la première femme qu’on ait décorée en France pour son mérite artistique ».

Amie des Lemonnier, Rosa Bonheur participa de façon significative au financement des premières Écoles Elisa Lemonnier. Il est également possible qu’elle ait influencé le projet pédagogique en plaidant pour la pratique, par les élèves, du dessin, une part importante de l’enseignement dispensé.

Source : collection particulière.


Jules Barthélémy Saint-Hilaire entre au ministère des Finances en 1825, puis se tourne vers le journalisme, collabore notamment au Globe, organe proche des saint-simoniens, et s’oppose à la politique conservatrice de Charles X. Il renonce à la politique afin de se consacrer à l’histoire de la philosophie antique et entreprend une traduction d’Aristote, qui l’occupera une grande partie de sa vie. Il en retire une certaine réputation, qui lui permet d’obtenir une chaire de philosophie antique au Collège de France en 1838 et un siège à l’Académie des sciences morales et politiques en 1839.

Après la Révolution de 1848, il est élu député républicain du département de Seine-et-Oise, mais est obligé de se retirer après le coup d’État de Louis Napoléon en 1851. En 1855, il est membre de la commission internationale chargée d’étudier le projet de Ferdinand de Lesseps de percement du canal de Suez en Égypte. Ses articles contribuent en grande partie à rendre le projet populaire en France, auquel participent plusieurs soréziens. En contact avec les Lemonnier, il soutient le projet d’Elisa en contribuant financièrement à la fondation des premières écoles.

Élu député en 1869, il rejoint l’opposition à l’Empire et, en 1871, il contribue à l’élection de Thiers, agissant comme son secrétaire. Nommé sénateur à vie en 1875, il prend place parmi les républicains modérés et, du 23 septembre 1880 au 14 novembre 1881, il est ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement Jules Ferry.

Suzanne Voilquin (1801-1877), née Suzanne Monnier, est une journaliste et écrivaine féministe française. Elle rejoint avec son époux Eugène Voilquin le mouvement saint-simonien en 1830. Ils apprécient la vie communautaire, Eugène se voit confier l’organisation d’une table d’hôtes rue Taitbout, dans l’une des maisons d’association fondée par le degré ouvrier. C’est Suzanne qui va diriger et gérer ce restaurant communautaire.

Au mois d’août 1832, Suzanne Voilquin participe à la fondation, par Marie-Reine Guindorf et Désirée Véret, d’un petit journal hebdomadaire appelé La Femme libre. Elle deviendra ensuite la directrice de cette publication qu’elle rebaptisera La Tribune des Femmes.

C’est de ce moment que Suzanne se lie avec Elisa Lemonnier, lectrice de la Tribune, à qui elle rend visite à Sorèze en 1834 (les Lemonnier habitent alors la maison de Jacques Rességuier). « Les trois semaines que je passai chez [Elisa] formèrent l’épisode le plus heureux de mon voyage, note Suzanne Voilquin. Ces instant heureux que je dus aux attentions aimables des deux époux et à leurs amis, le cœur ne peut les oublier. Dans cet espace de temps, il ne fut nullement question entre tous ces amis et moi de propagande. Les principes saint-simoniens développés dans le "Globe", depuis quatre ans, étaient "nôtres". Leur application devrait être laissée pour chacun aux circonstances, ainsi qu’à la diversité de nos aptitudes. (...) qu’aurions-nous pu faire ou dire de mieux ? »

Les deux femmes restèrent en correspondance jusqu’à la mort d’Elisa Lemonnier en 1865.

Source de l’image : Wikipedia.

La vie communautaire rue de Ménilmontant se termina fin août 1832 quand les principaux saint-simoniens furent convoqués devant la cour d’assises pour atteinte à la morale publique et pour violation de la loi limitant le droit de réunion politique. Prosper Enfantin et son ami l’économiste Michel Chevalier (ici croqués en compagnie d’Émile Barrault) furent condamnés à six mois de prison qu’ils effectuèrent à partir du 17 décembre 1832 à Sainte-Pélagie.

Source : wikipedia d’après University of Toronto Internet Archive

Alors que Charles Lemonnier se trouvait encore à Paris, une quarantaine de saint-simoniens se réunirent en communauté dans cette maison appartenant à Prosper Enfantin, au
n°145 de la rue de Ménilmontant. Ils se firent cordonniers, tailleurs, agriculteurs et cuisiniers, et travaillaient en chantant des hymnes dont les vers et la musique étaient leur œuvre.

Remarqués pour leur costume original, pantalon blanc, béret rouge et tunique bleue s’agrafant dans le dos en signe de solidarité, ils furent aussi l’objet de nombreuses caricatures, montrant les hommes occupés aux travaux quotidiens et les « dames saint-simoniennes » dans des occupations supposément masculines.

Devenus célèbres, ils ouvraient tous les dimanches les portes de leur « chartreuse » pour permettre aux badauds de découvrir leur organisation sociale innovante.

Source : Gallica.

Egalement vêtue des couleurs du mouvement (blanc pour l’amour, rouge pour le travail et bleu-violet pour la foi), la saint-simonienne pose ici sa main sur les livres de la doctrine, d’où s’échappe un papier portant la mention « La femme libre ».

Dans l’esprit du père Enfantin, cette liberté n’était pas que sociale ; l’émancipation de la femme passait nécessairement par la libération de ses instincts sexuels, une liberté amoureuse totale, et la constitution de communauté de femmes. L’idée apparut à Elisa, à qui Charles, entre deux voyages à Paris, eut l’imprudence de l’exposer, d’une « immoralité monstrueuse ». La dispute, inévitable, entre les époux mena à une brève séparation du couple, lui repartant pour Paris, elle demeurant à Sorèze. Ce n’est qu’après la dissolution du mouvement qu’ils se retrouvèrent - Charles faisant, vraisemblablement, amende honorable, et abandonnant ces idées décidément bien trop modernes pour l’époque.

Source : Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, RESERVE QB-370 (96)-FT4 (voir Gallica).

Cette petite brochure fut composée par Charles Lemonnier avant de partir pour Paris retrouver le groupe saint-simonien, mais il assure dans la biographie qu’il consacra plus tard à son épouse quvelle participa à son élaboration, et que plusieurs passages y seraient de sa main.

Dans ces pages est défendue une conception du féminisme qui nous paraît aujourd’hui bien datée, assumant une différence prétendue naturelle des sexes et de leurs capacités, et aspirations, réciproques.

Source : Gallica.

Barthélemy Prosper Enfantin, dit aussi Père Enfantin, est né à Paris le 8 février 1796 et mort à Paris le 31 août 1864. Il est l’un des principaux chefs de file du mouvement saint-simonien, mais est aussi un écrivain et un entrepreneur, à l’origine notamment du canal de Suez et du développement du chemin de fer, ainsi que le directeur d’un organe de presse, le Globe.

Après des débuts dans le négoce du vin qui l’emmènent en Allemagne, aux Pays-Bas, en Suisse et surtout en Russie où il reste de 1821 à 1823, Enfantin revient à Paris où il conseille le gouvernement. Avec le banquier Laffite, il crée la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon.

C’est un ancien camarade polytechnicien, Olinde Rodrigues, devenu l’un des disciples favoris de Saint-Simon, qui le lui présente, lors de la lecture du dernier livre du philosophe, Le Nouveau Christianisme. Peu convaincu au départ, Enfantin devient très vite un profond adepte de la doctrine de Saint-Simon.

Source : collection particulière.

Bien romanesque est la vie de Flora Tristan. D’origine franco-péruvienne, ayant perdu très tôt son père, elle épouse à 17 ans un graveur en taille-douce, André Chazal, chez qui elle est ouvrière coloriste. Battue, humiliée, séquestrée, elle s’enfuit de chez son mari alors qu’elle est enceinte de leur troisième enfant. Il la retrouve et la blesse d’un coup de pistolet ; le divorce étant interdit depuis 1816, Flora Tristan obtient néanmoins de la justice leur « séparation de corps ». Elle se battra toute sa vie pour le droit des femmes à divorcer.

Ouvrière dans les filatures et les imprimeries, mais aussi femme de lettres (son ouvrage majeur, L’Émancipation de la Femme ou Le Testament de la Paria, fut publié après sa mort), militante socialiste et féministe, Flora Tristan est l’une des figures majeures du débat social dans les années 1840. Elle est une figure forte du socialisme utopique, marqué par un sentiment religieux et mystique étranger à la lutte des classes.

Pour répandre ses idées, elle s’embarque, en 1843, dans « un tour de France », le circuit traditionnel des apprentis-compagnons. Son journal trace ses rencontres avec les femmes et les hommes ouvriers à travers la France. Elle n’achève néanmoins jamais son voyage, et meurt prématurément de la fièvre typhoïde le 14 novembre 1844 à Bordeaux, au domicile d’Elisa et Charles Lemonnier.

Les idées exprimées par Flora Tristan, selon lesquelles la cause du prolétariat est inséparable de celle des femmes, joueront un rôle essentiel dans la prise de conscience par Elisa Lemonnier, en 1848, de la situation de dépendance des femmes et filles d’ouvriers, et de la nécessité d’agir pour y mettre un terme.

Source : collection particulière.

Cet émouvant document est le faire-part envoyé à son entourage par les proches d’Élisa Lemonnier après ses obsèques, certainement célébrées dans une stricte intimité familiale.

Comme cela se pratique dans les familles protestantes, Élisa Lemonnier est inhumée dans la propriété familiale même, à Montpinier (commune de Blan, dans le Tarn).

Dans leur biographie en occitan En cèrca d’Elisà (voir la bibliographie accessible à la fin de cette salle), René et Pierre Ramond racontent leur redécouverte de la tombe d’Élisa (voir photo), ainsi que celle de Charles qui la rejoignit vingt-six ans plus tard, en 1891, et de leurs deux enfants morts en bas âge.

Source : collection particulière.

Ce portrait est celui de Caroline Coulomb (1828-1888), devenue Mme Maurice de Barrau de Muratel lorsqu’elle épouse le fils de Marie “Saint-Cyr” du Barrau qui, à la Sabartarié, avait fait l’éducation de la jeune Elisa.

Caroline est elle aussi une pédagogue, elle vit entourée d’enfants qu’elle instruit elle-même. Ses liens avec Elisa sont sans doute tardifs : elles ont une bonne génération d’écart. C’est quand la santé fragile d’Elisa se délabre et qu’elle vient faire de longs repos à Montpinier que les deux femmes deviennent particulièrement proches. L’œuvre de pédagogue de Caroline sera ainsi, pour une bonne part, influencée par la pensée d’Elisa.

Source de l’image : Bibliothèque Jean Maitron.

Pauline Roland naît en 1805 dans une famille de la petite bourgeoisie normande, et reçoit une éducation assez longue auprès d’un précepteur saint-simonien. Arrivée à Paris en 1833, obéissant à la doctrine du père Enfantin, elle donne naissance à trois enfants, de deux pères différents, et qu’elle élève seule.

Ecrivaine, Pauline participe à la rédaction de l’Encyclopédie nouvelle, et à diverses revues socialistes et féministes. Maîtresse d’école dans un phalanstère créé par le socialiste Pierre Leroux, elle se montre favorable à une instruction laïque, qui serait dispensée aussi bien aux filles qu’aux garçons. Acquise aux idées socialistes et au féminisme, elle demande pendant la révolution de 1848 son inscription sur les listes électorales, qui lui est refusée.

A Paris, elle crée avec Jeanne Deroin une association de secours pour les institutrices. Cette activité considérée comme subversive leur vaudra six mois de prison. Au lendemain du 2 décembre 1851, elle est condamnée pour résistance au coup d’Etat, alors qu’elle n’y a pas pris part, et déportée en Algérie. Graciée, elle rentre en France et meurt dès son arrivée, en 1852.

D’après le site Être féministe.
 

André Léo est une romancière, journaliste, essayiste et surtout militante du droit des femmes et de l’éducation pour toutes et tous. Née Léodile Béra en Poitou (à Lusignan, 1824), veuve en 1863, elle éleva seule ses deux fils Léo et André (d’où le nom de plume qui a été le sien à partir de 1862). L’un des enfants, André séjournera à Montpinier chez les Lemonnier, de fidèles ami et amie de la romancière. Charles en particulier s’occupera de soutenir le jeune homme à ses débuts dans la vie. Léodile sera également liée à Caroline du Barrau, qui hébergera à La Sabartarié son autre fils, Léo.

A Paris, André Léo crée en 1866 l’« Association pour l’amélioration de l’enseignement des femmes » et, en 1869, la « Société (mixte) de revendication des droits de la femme ». Son projet est très proche de celui d’Elisa Lemonnier et il semble même qu’elle ait un temps envisagé de prendre sa succession. Charles Lemonnier resta très lié à André Léo, qu’il invita à participer au Congrès de la paix de Lausanne, en septembre 1871, où elle fit un discours retentissant.

Renseignements aimablement communiqués par M. Jean-Pierre Bonnet.


Cette photographie, probablement prise à la fin de sa vie, est la seule connue de Charles Lemonnier (1806-1891), qui fut une des grandes figures du saint-simonisme et du pacifisme, deux engagements intellectuels et politiques qui ont jalonné sa vie et son oeuvre.

A partir de 1828, il fut professeur de philosophie au Collège de Sorèze, où il rencontra celle qui allait devenir son épouse, Elisa Grimailh. A la même époque, Lemonnier était rédacteur en chef de La France Méridionale ; ses articles concernant le développement de canaux d’irrigation et de navigation témoignent de ses sympathies saint-simoniennes. Très engagé dans ce mouvement, il y prit le parti d’Enfantin contre Bazard, et participa en 1831 à l’expérience communautaire de Ménilmontant - sans son épouse, qui désapprouvait les principes de libération sexuelle clairement affirmés par le « Père » Enfantin. Après la dissolution du groupe, Charles Lemonnier resta toutefois en liaison active avec les principaux militants saint-simoniens, et c’est ainsi qu’il fut appelé par les frères Péreire à d’importantes fonctions aux Chemins de fer du Nord, puis au Crédit Mobilier. Il fut également l’éditeur des Œuvres choisies de Saint-Simon parues en 1859 à Bruxelles.

En 1854, Charles Lemonnier fonda la Revue Philosophique et Religieuse et à partir de 1862 collabora au Phare de la Loire, un journal démocratique nantais.

Militant idéaliste, il organisa en 1867 à Genève le Congrès de la Paix tenu sous la présidence d’honneur de Garibaldi, au cours duquel fut fondée la « Ligue internationale de la paix et de la liberté » ; il en rédigea les textes fondateurs pour, en 1871, accéder à sa présidence qu’il assura jusqu’à sa mort. Le siège de la Ligue restera en Suisse jusqu’en 1919, date à laquelle elle sera transféré à Paris. Le titre de son journal, Les États-Unis d’Europe, dont le premier numéro paraît en janvier 1868, est emblématique et représente le but que s’est fixé la Ligue, à savoir réunir tous les peuples européens dans une fédération républicaine afin de parvenir à une paix durable.

Voici un lien vers son texte le plus célèbre : Les États-Unis d’Europe et une analyse de cet ouvrage.

Parmi les principales œuvres de Charles Lemonnier :

Religion saint-simonienne : église de Toulouse. Enseignement de l’Athénée. Avenir de la femme. Toulouse : des presses d’Aug. Henault, 1831.

Religion saint-simonienne : la tribune / Ode à Louvel. [Paris] : Everat impr., [183-?].

Religion saint-simonienne : avenir des partis. [Paris] : Everat impr., [1832?].

Religion saint-simonienne : évènemens d’hier, ordonnance de M. de Montalivet. [Paris] : Impr. Everat, [1832?].

Les Saints-simoniens !!!. [Paris] : Everat impr., [1832?]

Commentaire sur les principales polices d’assurance maritime usitées en France (Paris, Bordeaux, Marseille, le Havre, Rouen, Dunkerque, Bayonne), par Charles Lemonnier. Paris : Videcoq père et fils, 1843.

Élisa Lemonnier, fondatrice de la Société pour l’enseignement professionnel des femmes. Saint-Germain : impr. de L. Toinon, 1866.

La vérité sur le Congrès de Genève. Berne : Vérésoff et Garrigues, 1867.

Études cliniques et physiologiques sur les Eaux-Chaudes (Basses-Pyrénées) : leur mode d’action sur les principaux appareils et les principales fonctions de l’économie, par Lemonnier. Paris : Imprimerie Cusset et Cie, 1870.

La Question sociale : rapport présenté au congrès de Lausanne, le 27 septembre 1871 par Ch. Lemonnier. Paris : J. Cherbuliez, 1871.

Les États-Unis d’Europe. Paris : Librairie de la bibliothèque démocratique, 1872.

De l’Arbitrage international et de sa procédure : mémoire présenté à l’Assemblée générale de la Paix et de la Liberté le 8 septembre 1875. Genève : Imp. cooperative, 1873.

Formule d’un traité d’arbitrage entre nations : mémoire présenté à l’Assemblée générale de la paix et de la liberté le 8 septembre 1874. Genève : Imprimerie coopérative, 1874 et Paris : G. Fischbacher, 1878.

Du principe de neutralité et de ses applications. Genève : Imp. A.-F. Falk-Grasset, 1882.

Essai sur les modifications à apporter à la loi de 1838 à l’égard des aliénés criminels par Charles Lemonnier. Paris : Ollier-Henry, 1884.

Nécessité d’une juridiction internationale : conférence faite à Genève le 26 septembre 1881 par Charles Lemonnier / Lettre de Garibaldi, de Victor Hugo, de Alfred H. Love,... de A. Safi. Genève : Falk, [1881].

Les États-Unis d’Europe / Charles Lemonnier ; édition présentée et annotée par Pierre Musso. Paris : Éditions Manucius, 2011.

Parmi les personnalités éminentes qui ont participé au financement des premières écoles Élisa-Lemonnier figure François Barthélemy Arlès-Dufour (1797-1872), humaniste, homme d’affaires lyonnais pro-européen, commissionnaire soyeux et l’un des principaux saint-simoniens.

Fils d’un sous-officier, François Barthélémy Arlès épouse Pauline Dufour et accole - par souci d’égalité homme/femme - le nom de Dufour à celui d’Arlès. Élu à 35 ans à la Chambre de commerce et d’industrie de Lyon, il joue un rôle de premier plan tant sur le plan strictement industriel (organisation du chemin de fer Lyon-Paris, initiateur du Canal de Suez) que sur le plan financier (création du Crédit lyonnais) ou encore sur celui de l’humanisme. Il fonde la Ligue internationale et permanente de la paix avec Charles Lemonnier, le journaliste Émile de Girardin et le pacifiste Frédéric Passy, contributeur au développement du Saint-simonisme en France avec pour maxime : « Toutes les institutions sociales doivent avoir pour but l’amélioration du sort moral, intellectuel et physique de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre. » Il attache une grande importance à l’enseignement, lui qui fut autodidacte, en créant l’École centrale de Lyon et la Société d’enseignement professionnel du Rhône.

Militant pour l’égalité de l’homme et de la femme, il soutient personnellement Julie-Victoire Daubié dans sa démarche à devenir la première femme bachelière de France à Lyon. Avec elle, il fonde l’Association pour l’émancipation progressive de la femme dont il est le président. De l’Impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, il obtient que la Légion d’honneur soit décernée à la femme peintre Rosa Bonheur.

Militant pour la paix entre les peuples d’Europe par le commerce et le libre-échange, il catalyse en 1860 la signature du Traité de commerce franco-britannique, dit traité Cobden-Chevalier et dont le signataire pour la France Michel Chevalier dira : « La Chambre de commerce de Lyon a mérité que son nom fut inscrit dans l’histoire. Rien n’aura contribué autant que l’impulsion d’Arlès pour lui valoir cet honneur. »

Comme nombre d’autres saints-simoniens, c’est un fervent partisan du chemin de fer qui participe à son élaboration et son extension, notamment dans la région lyonnaise, en étant administrateurs des compagnies de Paris à Lyon, de Marseille à Avignon et de la de Paris à Lyon et à la Méditerranée (PLM).

Source du portrait :
Société des Études saint-simonniennes.


Lorsqu’en 1856 Elisa Lemonnier fonde la « Société de protection maternelle », destinée à fournir à des jeunes filles pauvres une « éducation et une instruction professionnelle », elle reçoit les encouragements et les conseils du républicain Lazare Hippolyte Carnot (1801-1888), qui avait été en 1848 Ministre de l’Instruction publique et le premier à proposer une instruction primaire obligatoire et gratuite pour les deux sexes « de sorte que les citoyens puissent correctement exercer le suffrage universel et supprimer les distinctions entre riches et dans les établissements publics. »

Fils cadet de Lazare Carnot (le « grand Carnot ») et frère du physicien Sadi Carnot, Hippolyte adhère vers 1828 au mouvement saint-simonien, et collabore longuement avec Enfantin au journal Le Producteur. En décembre 1834, il fait partie des fondateurs de la « Société française pour l’abolition de l’esclavage ». Comme Ministre de l’Instruction publique, il lance plusieurs idées qui, si elles ne sont pas immédiatement appliquées, auront de longues postérités, comme celle d’une École d’administration (qui deviendra l’ENA), ou son projet de loi du 30 juin 1848 proposant une instruction primaire obligatoire, qui inspirera Jules Ferry.

Source du portrait : Musée national de l’Éducation


Il semble que l’écrivain Alexandre Dumas (dit aussi Alexandre Dumas père, né le 24 juillet 1802 à Villers-Cotterêts et mort le 5 décembre 1870 à Puys, près de Dieppe) fasse également partie des premiers contributeurs financiers au projet éducatif d’Élisa Lemonnier.

L’engagement politique du romancier et dramaturge français date de la Révolution de 1830, où il s’engagea en faveur de la république et de la liberté, cette « grande et sublime déesse, seule reine que l’on proscrit, mais qu’on ne détrône pas ! »

Source du portrait : Wikipedia.

Émile (3 décembre 1800 à Bordeaux - 5 janvier 1875 à Paris) et Isaac (25 novembre 1806 à Bordeaux - 12 juillet 1880 à château d’Armainvilliers) Pereire (ou Péreire), souvent appelés les « frères Pereire », sont deux hommes d’affaires qui ont joué un rôle absolument capital dans le « décollage industriel » de la France du Second Empire.

Membres du mouvement saint-simonnien, ils avaient emprunté à Saint-Simon leur devise : « À chacun selon ses capacités, à chaque capacité selon ses œuvres ». Leur système reposant sur des spéculations nouvelles se renouvelant sans cesse (l’argent devant être « le ferment de toute végétation sociale ») amènera les frères banquiers à la faillite en 1867.

Ils sont les fondateurs, en 1835 de la Compagnie du Chemin de fer de Paris à Saint-Germain, et en 1852 du Crédit Mobilier qui permettait un crédit à long terme aux industriels, et ont investi dans l’Établissement thermal de Vichy, en 1854 dans la Societé Autrichienne des Chemins de Fer de l’État, dans des sociétés d’assurances comme « La Confiance » et « La Paternelle ». Les frères Pereire créèrent en 1859 la Société Houillère de Saint-Avold et L’Hôpital, en 1861 la Compagnie Générale Maritime, compagnie de transports maritimes de passagers et marchandises qui fut ensuite renommée Compagnie générale transatlantique, ainsi que des chantiers navals à Saint-Nazaire, dits Chantiers de Penhoët. Ils ont construit le chemin de fer de Bordeaux à Bayonne, la ligne de l’ouest de Paris (terminus St-Germain) en 1837, financé un réseau des routes agricoles voulu par la loi de 1857 imposant le boisement systématique de la forêt landaise, ensemencé plus de 10 000 ha de forêts en Pays de Buch et dans la Grande Lande et ils sont à l’origine de la création de la Ville d’Hiver d’Arcachon dans les années 1850, localité nouvelle que Napoléon III visita à deux reprises.

Amis des Lemonnier, ils confièrent à Charles d’importantes fonctions aux Chemins de fer du Nord, puis au Crédit Mobilier, et leur participation à la fondation de la « Société pour l’enseignement professionnel des femmes » d’Élisa est attestée.

Source des portraits : Le Télémaque.


Camille-Salomon Sée (Colmar 1847 - Paris 1919) effectue ses études de droit à la faculté de Strasbourg et s’inscrit en 1869 comme avocat au barreau de Paris. Affichant ses convictions républicaines, il va connaître une carrière fulgurante à la faveur de la chute de l’Empire. Dès le 10 septembre 1870, à 23 ans, Camille Sée est nommé secrétaire général du ministère de l’Intérieur auprès de Gambetta. En l’absence de ce dernier, lors des émeutes du 31 octobre, le secrétaire général décide de rassembler la garde nationale de Paris pour protéger le gouvernement, qui réussit à quitter l’Hôtel de Ville assiégé. Démissionnaire en février 1871, il fera un passage de douze mois à la sous-préfecture de Saint-Denis (juin 1872-mai 1873). Candidat aux élections législatives partielles dans la circonscription de Saint-Denis, il est élu député le 23 avril 1876. Inscrit au groupe de la gauche républicaine, il est réélu le 14 octobre 1877, mais se désiste après un premier tour de scrutin défavorable en 1881, date à laquelle il entre au Conseil d’État.

Sensibilisé très tôt aux problèmes de l’enseignement, son mandat le porte à s’intéresser particulièrement au fonctionnement des établissements pour jeunes filles que sont les maisons de la Légion d’honneur de Saint-Denis et d’Ecouen. Convaincu de la nécessité de donner l’égalité dans l’instruction aux jeunes gens et aux jeunes filles - ces dernières étant encore privées d’enseignement secondaire - Camille Sée va livrer durant son mandat une âpre bataille parlementaire afin d’œuvrer en ce sens. C’est le 28 octobre 1878 qu’il dépose à la Chambre un projet de loi visant à organiser, sur le plan national, l’enseignement secondaire des jeunes filles. En dépit de l’opposition virulente des partis conservateurs, la « Loi Sée » triomphe devant la Chambre en 1879 et est officiellement adoptée par le Sénat le 21 décembre 1880. Elle est complétée par la loi du 29 juillet 1881 instituant l’École normale des professeurs-femmes de Sèvres, dont la première directrice est la veuve de l’ancien ministre Jules Favre. Pourront alors se succéder les créations de lycées de jeunes filles en France, encouragées par la revue L’Enseignement secondaire de jeunes filles fondée et dirigée par Camille Sée.

Source : Site du Judaïsme d’Alsace et de Lorraine.

Playlist

Hélène de Montgeroult, Septième Sonate (ca 1805) par Ilya Rashkovskiy, piano

Sophie Gail, Romance « N’est-ce pas d’elle » (ca 1816) par Sylvie Nicephor et Etsuko Shoji

Louise Farrenc, Quintette n°1 opus 30, premier mouvement (1839) par The Schubert Ensemble

Louise Farrenc, Ouverture n°2 en mi bémol majeur opus 24 (1834) par le NDR Radiophilarmonir, dir. Johannes Goritzki

Louise Farrenc, Ouverture n°1 en mi mijeur opus 23 (1834) par le NDR Radiophilarmonir, dir. Johannes Goritzki

Louise Farrenc, Trio avec piano n°1 opus 33, Menuetto (1841-44) par Konstanze Eickhorst

Louise Farrenc, Mélodie en la bémol majeur (ca 1820-30) par Brigitte Engerer

Louise Farrenc, Trio avec piano n°1 opus 33, premier mouvement (1841-44) par le Trio Estampe

Louise Farrenc, Air russe varié opus 17 (ca 1820) par Konstanze Eickhorst

Louise Farrenc, Variations brillantes sur un air de Donizetti opus 15 (ca 1820) par Konstanze Eickhorst

Clémence de Grandval, Trio de Salon (1847) par Nancy Ambrose King, Jeffrey Lyman et Martin Katz

Pauline Viardot, Vieille Chanson (1867) par Ulf Schneider et Stephan Imorde

Pauline Viardot, Romance (1868) par Ulf Schneider et Stephan Imorde